Rose des vents le bealle

Les remises

Depuis les origines la chasse est demeurée libre, la notion territoriale n'étant dans un premier temps soumise à aucune loi, le gibier appartenait à son prédateur du moment qu'il était pris. Pourquoi en ce cas un encadrement aussi strict avec des peines parfois très lourdes contre les contrevenants a-t-il perduré jusqu'à l'abolition de notre monarchie ?

La raison du plus fort est toujours la meilleure...

Lorsque les conquêtes ont pris de fortes envergures territoriales, il a fallu pour en assurer une gestion pérenne des administrateurs généralement sélectionnés parmi les classes les plus favorisées.
Dès le IIIe [3ème] siècle les combatifs peuples germaniques s'implantent en Gaule, recevant en paiement de leur zèle une partie des terres qu'ils envahissent pour une autorité souveraine et sur lesquels ils règnent en hommes libres jusqu'à la fin de la période carolingienne (Alleux.). Les portions qui restent sont quant à elles administrées par des vassaux (Bénéfices.) ; ces deux formes d'exploitations seront pour la plupart converties en fiefs au fil du temps.

La forêt

Les romains, dans leur étroite collaboration avec les barbares, conservent les terres mises en culture et donnent aux germains des lieux boisés pour y élèver les animaux et en défricher une partie. Mais les peuples nomades, peu versés dans les activités sédentaires de l'agriculture, n'inclinent aucunement à la mise en valeur de leurs terres de cette façon. Leur exercice favori étant la chasse, ils s'appliquent donc en premier lieu à réintroduire bon nombre d'espèces sauvages éradiquées sur leur propriété dans un espace dédié qu'ils entretiennent : der forst.
Les forêts ont donc des privilèges et à ce titre tout animal s'y trouvant en est de ce fait protégé. Les germains défendaient de toucher aux prédateurs de leurs terres sous peine de torture, voire de mort, et introduisent aussitôt dans les mœurs la chasse particulière.
Un territoire déclaré forêt forçait les habitants des alentours à migrer sans aucun recours face à leurs impitoyables voisins qui s'appropriaient par là les biens abandonnés dans leurs pratiques mercenaires de déprédation. Les animaux sauvages ne pouvant être cantonnés, il fallait bien suivre le gibier.
Considérant cette manne, les autres seigneurs ont donc rapidement consacré une partie de leurs terres à la chasse.

Et cette pratique abusivement adoptée a perduré jusqu'au XIVe [14ème] siècle…

Par la suite, l'établissement de nouveaux lieux, des différents droits de corvées et d'exercice de la chasse est soumis à la seule autorité royale, peu à peu les petits agriculteurs peuvent de nouveau chasser les nuisibles sur les terres qu'ils exploitent mais doivent rendre le gibier à son propriétaire " légitime " ou s'acquitter de son paiement s'ils souhaitent le conserver.

La varenne, la garenne et le breuil

Egalement territoires réservés et donc défendus à moins d'être situés en terre franche (Libre.), la varenne se confond souvent avec la garenne dans de nombreuses régions mais sont toutefois différentes. Cette appellation assez récente évoque par sa terminaison le sable grossier (Arène.) qui entre dans la composition du terrain. Outre le nivellement, ce terme induit un développement limité de la végétation en taillis ou friches. L'une et l'autre pouvaient être protégées de fossés et de haies et correspondent plus aux territoires de chasse des seigneurs de moindre fortune.

La racine var a une notion de proximité, il s'agit donc d'un lieu proche d'une maison seigneuriale, facile d'accès et d'évolution, où se concentre le gibier dont on retrouve la racine dans l'allemand Ware : marchandise.

La racine gar évoque la rapidité et par essence un lieu où le déplacement est facilité. Le celtique en fait, outre la couleur rouge (Garance.) parce que le feu s'y propage rapidement, le lieu de repos (Garage.), mais également le jaret (Parce que le g s'est prononcé comme le j.).

Le breuil regroupe les particularités de garenne et de proximité, il est généralement clos de halliers.

La remise

Situées à proximité des lieux de chasse, les remises sont à l'origine le lieu de repos des très prisées perdrix. Les gallinacés levés au cours de parties de chasses abordaient la remise lorsque l'oiseau de proie les y poussait, les enfonçait. Les faucons tiercelets, sacres ou laniers utilisés pour cette pratique suivaient un entraînement assez technique pour ce type de vol pratiqué à grand renfort d'hommes et de chiens. Il fallait bien évidemment au préalable repérer les taillis où se réfugiaient ordinairement les proies pour pouvoir anticiper le lieu de leur prise au filet, au collet, etc. Certaines paroisses pouvaient concentrer un nombre important de remises sur son étendue, ces fiefs ont pris progressivement un caractère moins sauvages et sont devenus des réserves naturelles pour permettre au gibier de demeurer et se reproduire sereinement en attendant d'être chassé puisque, au même titre que le droit de chasse, les périodes en ont été très vite réglementées face aux abus qui ont de tous temps été commis.

Sources :

- Dictionnaire de la langue française - Littré
- Dictionnaire françois - Pierre Richelet
- Dictionnaire universel d'agriculture et de jardinage, de fauconnerie, chasse, pêche, cuisine et manége.
- Encyclopédie ou dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers. Jean LE ROND D'ALEMBERT, Denis DIDEROT
- Jurisprudence générale de MM. Dalloz. Les codes annotés. Code forestier, suivi des lois qui s'y rattachent et notamment des lois sur la pêche et sur la chasse : annoté et expliqué d'après la jurisprudence et la doctrine avec renvois au répertoire alphabétique et au recueil périodique de MM. Dalloz - Edouard DALLOZ, Charles VERGÉ, Louis ROBINET, Edouard MEAUME, Jules JANET
- Mémoires sur la langue celtique - Jean-Baptiste BULLET
- Origine et formation des noms de lieu - Hippolyte COCHERIS
- Recherches historiques sur le droit de chasse et sur la législation sur la chasse - G. VERHAEGEN

fief varenne chasse arène