Rose des vents le bealle

La Justice, lieu-dit.

Sur de nombreux plans anciens se retrouve une parcelle appellée " Justice ". Ce lieu fait référence aux anciens châtiments qui y ont été pratiqués, il se situe à proximité d'un passage fréquenté, de préférence élevé à la vue du tout-venant, son appellation n'est pas générique et peut varier en fonction des localités. Plusieurs places à ce destinées peuvent être déterminées dans une même localité lorsque plusieurs seigneurs s'en sont partagé l'administration.

Signe extérieur de justice

Les coutumes, issues des codes mis en place sur les territoires de la Gaule par les romains, se sont développées et adaptées au fil des siècles à leurs environnements territoriaux. La situation est devenue progressivement ingérable à tous les niveaux puisque chacun tendait à invoquer sa loi d'origine en fonction de l'envahisseur qui l'avait instituée à sa prise de possession (Certains lieux ayant acquis plusieurs coutumes locales par morcellement.).
Charlemagne débute l'uniformisation progressive par une loi commune à tout l'empire.
Deux principales justices existaient autrefois en France : royale et écclésiastique. Le roi donnait en bénéfice des terres, titres et revenus en échange de services militaires et spirituels (Duchés, provinces ecclésiastiques.). Les bénéficiaires auxquels ces territoires étaient confiés les divisaient pour en assurer la gestion entre leurs vassaux et arrière-vassaux.

Après le décès de Charlemagne les différents rois qui lui ont succédé n'ont pas réussi à poursuivre la réforme par manque d'envergure, ils perdent peu à peu de leur souveraineté laissant, à partir du IXe siècle, la majeure partie de leur royaume soumis à leurs sujets et au tout nouveau régime féodal : le droit de justice rendue au nom du roi est devenu un droit de justice seigneuriale, les duchés et leurs comtés sont devenus des seigneuries héréditaires, les bénéfices sont devenus des fiefs, etc.
Cette autre forme d'uniformisation, peu judicieuse pour l'autorité suprême, a tout de même le mérite d'instituer un cheminement vers une valeur toute relative d'égalité, puisqu'il est inévitablement arrivé par la suite que certains seigneurs sont devenus plus puissants que le roi (Eg. Jacques CŒUR.).
Si dans la plupart des régions la justice est la prérogative d'un seigneur haut justicier, dans d'autres (Anjou, Maine, Artois, Ponthieu et Blois) un moyen justicier peut la faire appliquer.
Cette évolution permet aux seigneurs d'organiser et de déléguer une partie de leur justice : les vicomtes, prévôts, châtelains, maires, etc. en ont la charge. La justice liée au patrimoine territorial s'est également démembrée avec la subdivision des fiefs : devenus rotures elle ne peut pas s'y appliquer (Voyez l'article Chef d'hostel), les vigueries et vicairies en ont alors la charge.

Le moyen de jugement le plus usité demeure aux temps anciens le combat judiciaire, plus communément appelé duel, peu coûteux à mettre en œuvre, qui a réglé beaucoup de mésententes civiles, quand les représentants de l'autorité seigneuriale n'avaient aucun code ou loi émanant du justicier à faire appliquer.
Les plus faibles ont par la suite pu prendre en recours le tribunal ecclésiastique, plus organisé, plus éclairé par son expérience acquise durant les croisades, pour faire valoir leurs droits et éviter cette issue dissuasive de leur démarche auprès du tribunal laïc.
Si la justice a été gratuite durant quelques temps, il a été par la suite permis aux greffiers de se faire payer l'expédition des jugements ; si quelques épices suffisaient à remercier un juge dans un premier temps, des coûts assez conséquents de procédures ont rapidement été mis en place et les petits seigneurs se sont volontiers déchargé de cette gestion.
Le combat judiciaire n'intervenait pas pour tous les litiges, en fonction des tribunaux, pour l'essentiel, en étaient exclus les différends en matière de douaire et de succession, de conventions écrites et de contestations d'ordre familial. Pour les sujets divers, dans les villes principales ont été mis en place des baillis, des sénéchaux, etc.

Dans la pratique, et après jugement, les moyens de punir le justiciable sont assez diversifiés et le seigneur peut proposer, outre les geôles et la déportation : le fouet, le pilori, le tombereau, l'échafaud, etc. en fonction de ses moyens. Lorsqu'une peine de mort est prononcée, le juge peut accorder au condamné une sépulture ecclésiastique ou attribuer la dépouille aux démonstrateurs de chirurgie. L'exécution doit être faite de jour, dans un emplacement prévu à cet effet, en public, sauf exceptions.
S'il est interdit aux officiers seigneuriaux et ecclésiastiques de faire appliquer les peines capitales sur les domaines royaux, les juges royaux peuvent par contre faire exécuter sur toutes les terres les sentences de mort.
Préalablement à toute exécution, les juges des seigneurs avec haute justice de la ville de Paris devaient faire confirmer leurs sentences par arrêt de la cour.
Les officiers de l'évêque devaient faire pratiquer les exécutions à mort aux fourches patibulaires de Saint Cloud, ou sur une terre de l'évêché en dehors de la ban lieue de Paris (Suivant le contrat appelé traité de paix, passé en 1270, entre le roi Philippe et l'évêché de Paris.). S'il était nécessaire que l'exécution soit faite à Paris, la cour s'en chargeait sur l'une des nombreuses places équipées de la ville.

Les fourches patibulaires

La fourche patibulaire, également appelée justice et gibet, était formée à l'origine de deux pièces de bois formant par en haut une fourche pour retenir une autre pièce de bois posée en travers. Les criminels condamnés à la peine capitale y étaient pendus et/ou exposés.
Pour en assurer la longévité, les piliers de bois ont été remplacés par des colonnes de pierre soutenant des traverses de bois. A partir du XVIIIe siècle les femmes ne peuvent plus y être exposées.

Ses origines sont antiques (Du latin Patibulum, Potence.) et les seigneurs ayant la puissance du glaive en sont dotés pour faire régner l'ordre sur leurs terres, il s'agit là du signe extérieur de leur autorité militaire ou cléricale. L'érection de fourches sur les terres seigneuriales est déterminée par le roi, ses modifications interviennent majoritairement par sa seule autorisation, mais restent avant tout régies par les coutumes des provinces du royaume. Elles sont toujours placées hors des bourgs et villages et leur emplacement est choisi de manière à dissuader les malveillances. Le nombre de leurs piliers variait de huit à deux selon la coutume des lieux et la qualité du justicier (Eg. Les fourches patibulaires de Montfaucon à Paris, sous administration royale, étaient composées de seize piliers.).

Herbert ii de vermandois pendu sur ordre de louis iv d outremer

Sources :
Mémoire sur l'origine du droit coutumier en France et sur son état jusqu'au XIIIe siècle, lu à la séance de l'Académie des inscriptions, le 29 mars 1829 - Jean-Marie PARDESSUS.
Collection de décisions nouvelles et de notions relatives à la jurisprudence.
Des droits du domaine de la couronne de France - Jean BACQUET.
Dictionnaire universel contenant généralement tous les mots françois, tant vieux que modernes...
Répertoire universel et raisonné de jurisprudence - Philippe-Antoine MERLIN.
Répertoire universel et raisonné de jurisprudence civile, criminelle, canonique et bénéficiale.
Traité des justices de seigneur et des droits en dépendants - Pierre JACQUET.

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