Rose des vents le bealle

LA FOND

L'alphabet que nous utilisons est l'héritage de très très anciennes écritures. Ces représentations d'élément basiques, pictogrammes primitifs, vont évoluer différemment en fonction des populations dans leurs graphie, prononciation et sens. Chaque lettre induit des amplitudes concrètes et abstraites, des idéogrammes. En fonction de leur place dans un mot les lettres ont une signification particulière qui se décline autour du sens de la première lettre, lui conférant ainsi une multitude de connotations toutes plus éloquentes les unes que les autres.

Base phonétique

F

La consonne phénicienne waw (Y) représente les différents points de résurgence (Les deux branches supérieures du Y.) reliés entre eux pour former une rivière (La hampe du Y.). Sa prononciation déformée se retrouve dans le gamma double ou digamma (Γ+Γ=Ϝ) du grec antique, qui se retrouve lui-même dans le ꟻ de l'alphabet étrusque à la base de notre alphabet latin, mais également chez nos ancêtres celtiques dans uruz (ᚢ) et yr.
Les u, v, w et f se confondent donc qui symbolisent basiquement la ramification, le conduit, le canal, le lit du cours d'eau, la cuve, le réservoir et de ce fait l'environnement aqueux.

O

Cette lettre représente le soleil, le tout, le plein, le volume et se confond assez souvent avec la lettre u qui sous-entendent dans la prononciation [u] (ou) le point où se concentrent l'eau, la vie et donc l'abondance.
Très tôt s'induisent dans la philosophie antique les concepts scientifiques (Point d'origine, taille, molécule, tournoiement, ardeur, etc.) qui laissent en ancien breton fo : vitesse ou fu : feu.

M puis N et D

Le m est quant à lui l'environnement originel, les cycles ascendants et descendants, les ondulations, la mère qui grossit puis enfante dont n est une partie, un petit refuge, un être de petite taille, un cycle et, dans le cas qui nous intéresse, un modèle réduit de sa représentation arquée : une voute, une cloche, une bosse, un tunnel, un pont qui représentent un petit abri ombrageux momentané.

Par analogie le n et le d sont souvent mis l'un pour l'autre.
Le D dans sa casse majuscule primitive représente une forme pyramidale. Il s'agit de la pierre autrefois élevée pour définir la limite territoriale, la borne qui symbolise un passage intermédaire qui s'ouvre et se ferme, la douane. Positionnée précisément, la frontière (Marchis, seuil.) regroupe différentes notions de lieu de transition, de refuge et donc d'habitation temporaire sécurisée, d'endroit ombragé et de l'aspect nocturne.
Le d dans sa casse minuscule est aussi une forme ronde qui s'élève dans une moindre mesure. Les grecs anciens ont dessiné dans ẟ (delta) une germination. La graine enterrée se développe à la lumière donne une pousse avec deux petites feuilles dont la plante arrivée à maturité produira à son tour une graine, etc.
Les significations permettent alors, outre l'aspect reproductible d'un cycle diurne, la dualité que l'on retrouve par exemble dans les mots deux, don, duplication et développement.

Ainsi le celtique fon (Réserve, dans le sens d'accumulation, abritée.) et l'ancien italien fod (Réserve, dans le sens de terre seigneuriale, qui fait germer.) se voient-ils des lieux différenciés par deux peuples géographiquement éloignés pour désigner l'abondance liée à une fontaine et à une portion de terre irriguée.

Ainsi Fon, Fond, Font…

Fon se rencontrait essentiellement dans le parler méridional de notre pays qui conserve son sens d'origine : fontaine.

Comme la prononciation du d et du t, la fond et la font se confondent mais l'orthographe aléatoire discerne une différence dans quelques termes d'ancien françois :

La fond La font
Forme incurvée Liquide
  • La fonde : Bourse, sac.
  • La fondeure : Creux, profondeur.
  • La fondefle : Fronde, machine de guerre pour jeter des pierres.
  • La fontele : Source.
  • La fonture : Fonte.

 

Les termes de base les plus courts sont les plus poétiques et les plus riches de sens. La plupart des mots que nous utilisons sont ou pas une construction et si on s'en réfère à l'ancien françois tai (Boue.), l'argile recoupe avec les contextes de ces deux orthographes puisque issue d'un milieu aqueux. Ce matériau à la propriété plutôt maléable s'introduisait autrefois dans la plupart des fabrications.
L'ancien françois tei : couvrir donnait l'adjectif tœt : couvert qui nous laissent le mot toit.
Les lieux-dits La Fond et La Font voient donc, au delà d'une fontaine maçonnée, leur sens enrichi de considérables et avantageux potentiels puisqu'il pourrait s'agir d'une habitation dotée de l'eau courante, d'un lavoir, d'une tuilerie, etc.

Le latin discernant par un genre masculin, féminin ou neutre l'importance d'un terme, la version masculine de fond que nous utilisons nous provient du fundus latin déjà deux siècles avant notre ère qui lui donne tous ses sens actuels (Un repère de base situé au dessous ou au dessus d'un niveau d'eau, un contenu, un lieu éloigné, etc.) et évoquent toute l'importance qu'ont prises les lettres basiques qui l'ont constitué et que la transformation du o en u n'altère en rien.

Les fonts baptismaux, quant à eux, apparus bien plus tardivement (IIIe [3ème] siècle) avec le christianisme sont issus du latin fons qui englobe les significations d'eau, de fontaine, d'origine et de principe.

Sources :

- Glossaire françois faisant suite au "Glossarium mediæ et infimæ latinitatis" avec additions de mots anciens extraits des glossaires de La Curne de Sainte-Palaye, Roquefort, Raynouard, Burguy, Diez, etc. et une notice sur Du Cange - Léopold FAVRE
L'aventure des écritures.
- Les noms de lieu de la France leur origine, leur signification, leurs transformations - Auguste LONGNON
- Le théâtre d'agriculture et mesnage des champs, dans lequel est représenté tout ce qui est requis et nécessaire pour bien dresser, gouverner, enrichir et embellir la maison rustique - Olivier DE SERRES
- Mémoires sur la langue celtique - Jean-Baptiste BULLET
- Mémoire sur l'origine égyptienne de l'alphabet phénicien -  Emmanuel De Rougé et Jacques De Rougé
- Novitius seu dictionarium latino-gallicum, Schreveliana methodo digestum ou Dictionnaire latin-françois, suivant la methode de Schrevelius qui renferme les mots des auteurs latins, sacrés et profanes ; avec les etymologies ; les mots synonymes, & leurs opposés. Les termes d'histoire, de geographie, de droit, de medecine, de botanique, de mathematique, & des autres arts, &c. Les inflexions des mots qui sont dans les auteurs latins. Pour donner en peu de temps a toutes sortes de personnes, l'intelligence de la langue latine - Nicolas MAGNIEZ

fief sol