Rose des vents le bealle

La cour

Parmi les mots qui, dans la composition des noms de lieu romano-francs, constituent l'élément principal, cortis est celui qu'il convient d'étudier le premier avec le plus de détail : il fut de tous, sans conteste, le plus usité ; et, à défaut de la liste trop longue, des vocables dans lesquels on le reconnaît, un choix raisonné de ceux-ci sera l'occasion de remarques qui seront formulées une fois pour toutes, et qu'on se contentera de rappeler brièvement, lorsqu'à propos de noms de lieu formés sur d'autres mots que cortis, on aurait sujet de les répéter.

Le mot cortis est ancien dans la langue latine : il est employé, au cours du siècle qui précéda l'ère chrétienne, par le grammairien Varron, sous la forme cohors, au génitif cohortis, et il désignait la cour intérieure d'un établissement rural, la cour entourée par les étables et les autres bâtiments. C'est là le sens primitf, originel, de ce mot, celui qu'on retrouve au premier siècle de notre ère, chez l'agronome Columelle ; le sens de troupe entourée, palissadée — d'où le terme militaire cohorte — est l'effet d'une métonymie.

Le sens primitif a subsisté, et il a donné en français, par exemple, le mot cour ; toutefois, dans le langage des campagnes le mot cohors, réduit à cors, et employé, même au nominatif, sous la forme cortis, originairement génitive, ne désignait plus simplement la cour de la ferme, siège du domaine rural. C'est grâce à ce que la partie a été prise pour le tout que le mot cortis est devenu, non seulement un synonyme de villa, c'est-à-dire d'exploitation rurale, mais aussi un véritable équivalent de notre mot " domaine ", et l'on voit, dans la Vita sancti Placidi, qui, en son premier état, date du VIe siècle, un personnage possédant en Sicile " plusieurs cortes très riches et de bon produit, contenant bois, eaux et cours d'eau, moulins, pêcheries, chacune cultivée par quelques centaines d'esclaves ". A cette époque, fundus, prædium, ager, villa, cortis, (Fara " domaine ") étaient des termes complètement synonymes, et c'est au sens de domaine rural que cortis figure en de nombreux noms de lieu composés de l'époque mérovingienne.

Là ne s'arrêtent pas les évolutions de cortis ou de court, forme romane de ce mot. Comme il désignait tout domaine rural, et par conséquent la résidence rurale du rois et des seigneurs, on appela du nom court le siège de la justice du roi ou des seigneurs, le lieu où le roi ou les seigneurs rendaient la justice, puis, enfin, toute assemblée chargée de rendre la justice. C'est lorsque cour commença à devenir synonyme de siège de justice qu'une confusion facilement explicable se produisit dans l'esprit des gens instruits, touchant la forme latine de ce mot : c'est par suite de cette confusion qu'on écrivit plus d'une fois curia au lieu de curtis ou cortis dans les noms de lieu composés qui datent de l'époque mérovingienne. Mais le mot curia qui, en latin, désigna d'abord le lieu où le Sénat s'assemblait, et par suite le lieu de réunion, la salle de séance, d'une assemblée quelconque, n'a rien à voir dans l'étymologie du mot français " cour ", quelle que soit son acception — mot qui devrait s'écrire régulièrement court, la perte du t final étant due à l'influence du latin curia — ni dans celle des noms de lieu qui présentent ce mot.

Le mot court, au sens de domaine rural, paraît avoir été généralement préféré au mot villa par la plupart des nations germaniques qui envahirent les provinces occidentales de l'Empire romain. On le trouve, sous les formes cortis et curtis, dans les lois de plusieurs des nations barbares : Wisigoths, Bourguignons, Francs Saliens, Lombards et Bavarois ; mais aucune nation de l'affectionna au même degré que les Francs.

On rencontre des noms de lieu formés à l'aide de cortis dans la Bourgogne, la Franche-Comté, et les parties de la Suisse qui avoisinent le Jura, mais surtout dans les pays où s'établirent les hommes de race franque : Lorraine, Champagne, Artois, Picardie, Ile-de-France ; ils sont plus clairsemés dans l'Orléanais, le Chartrain, le Vendômois, le Maine, la Normandie, l'Anjou, la Touraine ; au delà de la Loire on n'en voit qu'entre ce fleuve et la Sauldre ; encore cette bande de terre dépendait-elle de l'Orléanais. Parmi des derniers pays, c'est le Maine qui en offre le plus grand nombre : le fait ne semblera pas surprenant, si l'on se rappelle qu'au temps de Clovis, le Mans était le chef-lieu d'un petit état franc où régnait Rignomir. D'ailleurs, on a pu, par des fouilles, constater l'existence dans le Maine d'un îlot de population germanique ; et d'une manière générale, la limite de la colonisation germanique en Gaule, telle que l'étude des noms de lieu permet de la tracer, diffère peu de celle qui résulte de la carte des cimetières mérovingiens dressée vers 1877 pour la Commission de topographie des Gaules, par le Dr Hamy : elle est seulement un peu plus précise.

En deçà de cette limite le mot cortis tenait trop de place dans le langage courant pour apparaître dans la toponomastique autrement qu'en composition. Il faut s'éloigner, parfois beaucoup, de la région soumise à l'influence franque pour découvrir, très rares et très disséminés, des noms de lieu représentant ce mot employé seul : Cours (Lot, Nièvre, Rhône, Deux-Sèvres), Cours-de-Pile (Dordogne), Cours-les-Bains (Gironde), Cours-les-Barres (Cher), ainsi que Cour-sur-Loire (Loir-et-Cher). Chacune de ces localités doit vraisemblablement son origine à un domaine rural dont le propriétaire, de race franque, avait importé le mot cortis, l'empruntant à la langue adoptée dans la contrée d'où il venait.

Le domaine rural désigné à l'époque mérovingienne par ce mot constituait le plus souvent, en raison des habitation des tenanciers et de leurs familles, un véritable village. Voilà pourquoi, dans les parties de la Suisse qui sont situées à la limite des langues, et où certaines localités ont à la fois un nom français et un nom allemand, on voit le mot cour, terme initial du premier, traduit dans le second par dorf : Courcelon = Sollendorf ; — Courchapoix = Gebstorf ; — Courgenay = Jennsdorf ; — Courrendlin = Rennendorf ; — Courroux, de Cortis Rodoldi = Lüttelsdorf, pour Rutolsdorf ; — Corban, pour Courbaon, de Cortis Battonis = Battendorf ; ces localités appartiennent au canton de Berne.

On remarquera par ces exemples que le nom allemand, à la différence de ce qui se produit dans le nom français, le terme principal est rejeté à la fin, la première place étant tenue par le déterminatif : c'est là l'application d'une règle qui, dans la toponymie germanique, ne souffre pas d'exceptions. Au contraire, dans les noms romans, ainsi qu'on va l'observer, le déterminatif occupe tantôt la première place, tantôt la dernière. Henri d'Arbois de Jubainville émettait à ce propos l'opinion que la disposition qui donne la seconde place au détermintatif est plus moderne que celle où le déterminatif figure en tête : que, par exemple, le nom Bougival, Baudegisili vallis, appartient à l'époque mérovingienne, tandis que Vaugirard, Vallis Girardi, date seulement du XIIIe siècle ; que Nova Villa, Neuville, est plus ancien que Villa nova, Villeneuve, qui serait une forme contemporaine du nom de Vaugirard. On peut étayer cette théorie de faits qui semblent probants ; mais pour peu qu'on aille au fond des choses, on s'aperçoit combien elle est décevante, et l'on est forcé de reconnaître que les deux constructions, les deux dispositions, existent dès l'époque franque. Et l'on est amené à constater, dans les noms romans de la période mérovingienne, deux courants différents : le courant germanique, où l'ordre des mots, réglé sans appel, donne toujours la première place au déterminatif ; et le courant romain, qui laisse d'abord une certaine liberté d'action, mais qui, après plusieurs siècles, arrive à rejeter le déterminatif à la fin du mot, conformément à l'usage qui a prévalu dans la langue française. Dans les noms de lieu formés à l'aide du bas-latin cortis, et qui semblent caractéristiques de la colonisation franque, le courant germanique l'emporte de beaucoup.

Sauf de rares exceptions qui seront signalées plus loin, le mot cortis est combiné avec un nom propre d'origine germanique qui rappelle l'un des premiers possesseurs de la cortis. Parfois ce nom paraît aussi dans l'appellation de telle ou telle dépendance de la cortis. C'est ce qu'on observe à Courbetaux (Marne) ; le nom primitif de ce village, Cortis Bertoaldi, a pour second élément un nom d'homme qu'au VIIe siècle la chronique de Frédégaire appliquait à un maire du palais au royaume de Bourgogne, et qui, après avoir été usité au moyen âge comme nom de baptême, subsiste aujourd'hui comme nom de famille sous les formes Bertaud, Bertaux, et, vers le Jura, Berthod et Berthoud. Or, ce nom figure à Courbetaux — on devrait dire Courbertaux, mais par un phénomène de dissimulation assez commun, la seconde r a disparu — non seulement dans l'appellation de la commune, mais dans celles d'un ruisseau et d'un bois de territoire, le Ru-Bartaud et le Bois-Bertaud.

Le mot bas-latin cortis se présente aujourd'hui sous une forme unique, et correcte, court, lorsqu'il est employé — c'est le cas de beaucoup le plus fréquent — comme élément final : Gandrecourt, Raucourt, Vaudoncourt : à cette place rien ne le comprime, et il reste toujours lui-même. En revanche, s'il figure en tête d'un nom de lieu de deux ou trois syllabes, sa forme romane est susceptible d'altérations plus ou moins importantes.

Elle n'échappe à ces altérations qu'à la condition d'être suivie d'un son voyelle : Coutabœuf (Seine-et-Oise) = Cortis Æbodi ; — Courtabon (Indre-et-Loire) = Cortis Abbonis ; — Courtagnon (Marne) = Cortis Haganonis ; — Courtangis (Sarthe) = Cortis Ansegisi ; — Courtenot (Aube) = Cortis Arnulfi ; — Courtoin (Yonne) = Cortis Audœni ; — Courtomer (Seine-et-Marne) = Cortis Audomari, vraisemblablement.

Le t final subsiste aussi dans les noms de lieu du département de l'Ain, les plus méridionaux de ceux formés sur cortis, dans lesquels ce mot est devenu curt : Curtablanc, Curtafond, Curtafray = Cortis Acfredi, Curtalin.

Devant une consonne, cortis devient le plus ordinairement cour : Courbouvin (Aisne) - Cortis Bovane ; — Courbouzon (Loir-et-Cher) = Cortis Bosonis ; — Courcerault (Orne) = Cortis Ceroldi ; — Courgivaux (Marne) = Cortis Giboaldi ; — Courtoulin (Sarthe) = Cortis Dodoleni.

Parfois cependant l'o latin s'est maintenu en français sans prendre le son ou : Corcundray (Doubs) = Cortis Gundradi ; — Corfélix (Marne) = Cortis Felicis ; — Corgebin (Haute-Marne) = Cortis Gibuini ; — Corgengoux (Côte-d'Or) = Cortis Gangulfi ; — Corgoloin (Côte-d'Or) = Cortis Godoleni ; — Cormolain (Calvados) = Cortis Modoleni ; — Cornantier (Marne) = Cortis Nantharii ; — Corquelin (Aube) = Cortis Roccoleni ; — Corribert (Marne) = Cortis Rigoberti ; — Corricard (Eure) = Cortis Richardi ; — Corrobert (Marne) = Cortis Rotberti ; — Cortambert (Saône-et-Loire) = Cortis Ansberti, etc.

On peut citer quelques exemples de cor pour cortis initial, ayant perdu l'r par suite de circonstances diverses, mais non toujours appréciables ; dans ce cas, la forme vulgaire du nom de lieu est assez altérée pour qu'en l'absence de textes anciens on hésite à se prononcer sur son origine : Cocloix (Aube) et Coclois (Saône-et-Loire) = Cortis Claudia ; — Corabœuf (Côte-d'Or) = Cortis Ratbodi ; — Cosdon (Aube), prononcé Côdon, en 1328 Coaudon = Cortis Oddonis ; — Coizard (Marne), en 1164 Coheirart et en 1375 Coirart = Cortis Hairhardi ; — Colléard (Marne) = Cortis Liethardi ; — Colligis (Aisne) = Cortis Lietgisi ; — Colonard (Orne) = Cortis Leonardi ; — Commarin (Côte-d'Or) = Cortis Mariani.

Cette chute de l'r s'est produite aussi alors que l'o de cortis était devenu ou : Coubert (Seine-et-Marne), au XIIIe siècle Corbeard ; — Coubertin (Seine-et-Marne, Seine-et-Oise) = Cortis Bertane ; — Coulandon (Allier - Ce département se trouvant complètement en dehors de la région décrite plus haut, nous proposons d'étendre à Coulandon l'hypothèse formulée au sujet de l'origine des localités dont le nom représente cortis employé seul.) = Cortis Landonis ; — Coulevon (Haute-Saône) = Cortis Levonis ; — Coulimer et Coulmer (Orne) = Cortis Lietmari ; — Coupvray (Seine-et-Marne) = Cortis Protasii ; — Coutarnoux (Yonne) = Cortis Arnulfi ; — Coutevroult (Seine-et-Marne) = Cortis Eberulfi.

La syllabe initiale procédant de cortis, et altérée par la chute de l'r, s'est parfois nasalisée, la nasale étant une n ou, devant une labiale, une m : Combertault (Côte-d'Or) = Cortis Bertoaldi (cf. Courbetaux) ; — Comblanchien (Côte-d'Or) = Cortis Blancane ; — Compertrix (Marne) = Cortis Bertrici ; — Concevreux (Aisne) = Cortis superior ; — Confavreux (Aisne) = Cortis fabrorum ; — Confrançon (Ain) = Cortis Francionis.

Si le mot cortis, employé seul, n'a pu constituer un nom de lieu dans les régions situées en deçà de la Loire, il n'en est pas de même de son dérivé corticella, formé à l'aide d'un suffixe diminutif fort usité en latin vulgaire, et qu'on trouve en français, par exemple dans les mots masculins lionceau, monceau, ponceau, et dans le mot féminin nacelle.
Corticella, c'est-à-dire " le petit domaine ", est l'origine des noms de lieu suivants : Corcelle (Ain, Doubs, Saône-et-Loire), Corcelles (Ain, Côte-d'Or, Jura, Nièvre, Rhône, Haute-Saône, Saône-et-Loire), Courcelle (Doubs, Loiret, Nièvre, Pas-de-Calais, Haute-Saône, Vienne), la Courcelle (Charente, Cher, Creuse, Haute-Vienne, Yonne), Courcelles (Aisne, Aube, Charente-Inférieure, Côte-d'Or, Creuse, Doubs, Eure, Indre-et-Loire, Loir-et-Cher, Loiret, Marne, Haute-Marne, Mayenne, Meurthe-et-Moselle, Meuse, Nièvre, Oise, Pas-de-Calais, Sarthe, Seine, Seine-Inférieure, Seine-et-Marne, Seine-et-Oise, Somme, Vosges, Yonne). — On n'a pas lieu, semble-t-il, de distinguer, parmi ces noms, ceux qui se terminent par une s : ainsi sont écrits aujourd'hui beaucoup de noms de lieu dont la forme primitive présentait une finale muette, sans apparence de pluriel.

Il est à remarquer que, dans l'énumération qui précède, les noms dont la première syllabe affecte la forme cor appartiennent à la région bourguignonne.

Corcelle, Courcelle et leur variante picarde Courchelle, — qu'on rencontre parfois dans les textes — bien que résultant de la combinaison de cortis avec une désinence diminutive, n'ont pas laissé de former à leur tour des diminutifs, d'ailleurs plus modernes : Corcelette (Ain), Corcelotte (Doubs), Courcelette (Somme), Courcelotte (Côte-d'Or), Courchelettes (Nord) ; autrement dit " le petit Corcelles " ou " le petit Courcelles ".

Dans les noms de lieu formés sur cortis, le déterminatif est d'ordinaire un nom de personne germanique ; mais il n'en est pas toujours ainsi, quelques-uns des exemples qui viennent d'être cités l'attestent. La règle générale a des exceptions, qui vont être examinées.

Tantôt cortis est combiné avec un adjectif.

  • Cortis dominica, " le domaine seigneurial " : Courdemanche (Eure, Orne, Sarthe), Courdemange (Marne), Courdimanche (Seine-et-Oise), Courtemanche (Somme). […]
  • Cortis jusana, " le domaine d'en bas " : Courgerennes (Aube), au XIIe siècle Curtjusaine, dont l'équivalent Juzennecourt (Haute-Marne), offre la disposition inverse des termes. — La racine de l'adjectif bas-latin qui est ici mis en cause est celle que reproduit notre vieil adverbe jus, " en bas " ; peut-être cet adjectif entre-t-il dans la composition du nom Juzanvigny (Aube), en 1145 Jusenvisneir.
  • Cortis superior, " le domaine d'en haut " : Concevreux, en 1244 Corcevreus. — L'adjectif se comporte sensiblement de même dans Montseveroux (Isère), qui répond à Mons superior, tandis que Monsteroux, nom d'une localité toute voisine, représente Mons subterior.
  • Romana Cortis, " le domaine romain " : Romainecourt (Aube).

Tantôt le déterminatif de cortis est un nom commun désignant le possesseur du domaine.

  • Abbatis cortis : Abbecourt (Aisne, Oise). La dignité abbatiale tient lieu de la personnalité du possesseur […].
  • Cortis monasterioli, " le domaine du petit monastère ", aujourd'hui Cormontreuil (Marne), appartenait, au IXe siècle, à la fameuse abbaye de Saint-Remy de Reims ; celle-ci, sans doute, la tenait d'un monastère moins important qui lui avait été soumis.

Ailleurs cortis est combiné avec un nom propre collectif, ou pour mieux dire un nom de population.

  • Auménancourt-le-grand et Auménancourt-le-Petit (Marne) = Alamannorum cortis, " le domaine des Alamans ".
  • Confrecourt (Aisne) = Cortis Francorum ; il va sans dire que cortis n'est aucunement représenté par la dernière syllabe du nom, comme pourrait le faire croire le t qui la termine à tort. […]

Le nom de Confavreux (Aisne), […], offre un exemple de composition un peu différente, et semble indiquer que le village était occupé par une population industrielle.

Voici maintenant une série de vocables qui rentrent, à la vérité, parmi ceux dans lesquels cortis est accompagné d'un nom de personne ; ils n'en constituent pas moins une exception à la règle générale, car ici les noms de personne appartiennent à l'onomastique romaine.

  • Cortis Claudia : Cocloix (Aube) et Coclois (Saône-et-Loire).
  • Cortis Felicis : Corfélix (Marne).
  • Cortis Genesii : Courgenay (Calvados, Yonne, et canton de Berne), Courjeonnet (Marne).
  • Cortis Palladii : Courpalay (Seine-et-Marne).
  • Cortis Protasii : Coupvray (Seine-et-Marne).
  • Cyrici cortis : Circourt (Meurthe-et-Moselle, Vosges).
  • Jovini cortis : Martincourt (Ardennes, Meurthe-et-Moselle, Meuse, Oise).
  • Mauri cortis : Maucourt (Meuse, Oise, Somme), Maurcourt (Seine-et-Oise), Morcourt (Aisne, Oise, Somme). — Maucourt était le nom du village sur l'emplacement duquel fut édifié la ville de Vitry-le-François.
  • Petri cortis : Pierrecourt (Haute-Saône, Saône-et-Loire).
  • Remigii cortis : Remicourt (Aisne). — Remicourt (Marne) était à l'origine Ramicort.
  • Romani cortis : Romaincourt (Seine).
  • Sulpitii cortis, ou mieux Suplitii cortis : Souplicourt (Somme).

Une dernière série d'exceptions à la règle générale, beaucoup plus importante que celles qui précèdent, se composent de vocables dont le déterminatif est, non pas un nom propre de personne, mais un adjectif formé à l'aide du suffixe -acus ou -iacus sur un nom propre de personne, soit germanique, soit romain [Le suffixe -acos, latinisé -acus, tient dans l'onomastique gauloise une place considérable, et a contribué à former un nombre immense de noms de lieu gallo-romains encore subsistants aujourd'hui.
La valeur de ce suffixe est un peu vague, et comparable à cet égard à celle du suffixe français -ier, -ière, dérivé du latin -arius, -aria, qui sert à former : des adjectifs dérivés d'adjectifs, comme premier et singulier ; des adjectifs dérivés de substantifs, comme régulier et séculier ; des noms d'agents ou de professionnels, comme chevalier, potier, tuilier ; des noms locaux communs dérivés de noms communs, comme foyer, grenier, rivière, sablière ; des noms de lieu dérivés de noms propres d'hommes, comme Bernardière, Blanchardière, Girardière.]

  • Abriniaca cortis : Evergnicourt (Aisne).
  • Aculiaca cortis : Aguilcourt (Aisne).
  • Albericiaca cortis : Auberchicourt (Nord).
  • Aldiniaca cortis : Audignicourt (Aisne).
  • Anguliaca cortis : Anguilcourt (Aisne).
  • Aniaca cortis : Agnicourt (Aisne, Oise, Somme).
  • Baldiniaca cortis : Baudignécourt (Meuse).
  • Bertiniaca cortis : Berthenicourt (Aisne).
  • Bettiniaca cortis : Bétignicourt (Aube).
  • Bertmariaca cortis : Berméricourt (Marne).
  • Gerniaca cortis : Gernicourt (Aisne).
  • Gudiniaca cortis : Guignicourt (Aisne, Ardennes).
  • Limosiaca cortis : Melzicourt (Marne), originellement Lemesicourt.
  • Mutiaca cortis : Muscourt (Aisne).
  • Ponciniaca cortis : Pontséricourt (Aisne).
  • Porcariaca cortis : Pixerécourt (Meurthe-et-Moselle).
  • Ratbertiaca cortis : Rapsécourt (Marne).

Dans la plupart des noms de lieu qu'on vient de rencontrer, en dehors du dernier groupe, le nom commun cortis est suivi de son déterminatif. La disposition inverse est, il ne faut pas le perdre de vue, de beaucoup plus fréquente ; mais ce mot étant alors aisément reconnaissabe, l'intérêt qu'offrent les vocables réside dans l'étude des altérations subies par les noms de personne qu'ils présentent comme termes initiaux.[…]

Sources :
Les noms de lieu de la France leur origine, leur signification, leurs transformations - Auguste LONGNON

fief justice cour